Toulouse / 20-06-2019 /
Témoignage de Séverine, enseignante en lycée.
Dans la cour du rectorat de Toulouse le 20/06/2019.
J’ai participé à l’organisation de l’action d’aujourd’hui. Notre idée est qu’au fond, on a fait beaucoup de choses, on est allé très loin dans le sens où l’on ne s’est pas démobilisés depuis le mois de Novembre et qu’il n’y a jamais eu aucune concession sur la réforme Blanquer du lycée par exemple. Il y a eu quelques concession sur la marge de la loi de « l’école de la confiance », mais sur la réforme, rien du tout.
Donc on était prêts à aller jusqu’à l’occupation du rectorat et éventuellement au rapport de force un peu physique et un peu dur. Parce que de toute façon il y a un mépris tellement absolu et important qu’on savait que ça pouvait aller jusque là mais aussi on a la conviction qu’on se bat pour quelque chose d’important.
De soi à soi déjà, de quoi on parle quand on parle d’enseignement ? D’éducation ? Dans quel modèle on se reconnaît ? Et ça c’est important. Chacun s’investit comme il le peut mais quand même, je n’avais pas envie de lâcher ça. Quand bien même on ne serait qu’une poignée (ce qui n’est pas le cas), c’est important de résister.
Et par rapport aux négociations autour de la loi Blanquer ?
Les négociations ? (rires) Il n’y en a pas eues !
Ils appellent ça des « concertations », c’est à dire que le ministère nous envoie un lien internet avec des questions un peu fléchées. Du même type que pour le « grand débat » (rires). C’est exactement la même chose et on n’a jamais le résultat de ces concertations. De toute façon, c’est une concertation totalement biaisée.
C’est très descendant comme façon de faire. On doit appliquer ce qui sera mis en place. Il y a un semblant de concertation pour qu’on ait l’impression d’être écoutés, mais personne n’a son mot à dire et personne n’est dupe.
Pourquoi cette mobilisation aujourd’hui au rectorat puisque vous êtes déjà venus à plusieurs reprises?
C’est une question qui se pose, pourquoi le rectorat ? Parce que déjà le rectorat c’est là où est la rectrice et que la rectrice est notre supérieure hiérarchique directe avant le ministère, donc Jean Michel Blanquer. Elle nous a reçus il y a une semaine mais n’a pas répondu à nos demandes. Donc ce n’est pas un dialogue. Quand on lui parle elle entend mais n’écoute pas.
Mais ça c’est à tous les niveaux, ils nous voient, nous comprennent et après il n’y a aucun retour. Donc c’est beaucoup d’énergie à chaque fois.
Mardi dernier, nous étions 200. Il y avait 15 camions de CRS qui protégaient le rectorat. On trouvait que c’était une réponse démesurée et qui prouvait bien que l’on n’était pas dans le dialogue. Ils reconnaissent sans vraiment l’admettre que le BAC (qui est un enjeu important) ne se déroule pas bien et qu’ils ont peur de ne pas réussir à le mener comme Blanquer l’a dit.
Nous sommes venus à plusieurs reprises et jamais rien n’en est sorti mis à part se faire gazer.
Quand vous dites « venus », c’était sous quelle forme ?
C’était et ça a toujours été avec des revendications précises. Ces revendications sont à la fois locales, c’est à dire qu’on veut l’assurance que tous les contrats des précaires soient maintenus surtout pour les collègues qui étaient dans le mouvement, que leur contrat soit reconduit jusqu’au 31 Août parce qu’il y a une politique au rectorat de Toulouse qui est qu’on ne paye pas les congés payés, ce qui n’est pas légal d’ailleurs. Ils ne respectent aucune règle du contrat de travail.
Et ce que l’on demande aujourd’hui c’est l’indemnisation des jours de grève, en tout cas qu’on ne nous les retire pas.
Et la dernière chose, c’est qu’ils reconnaissent que le BAC s’est passé avec des irrégularités et qu’ils arrêtent de nier (parce que c’est ça qui est très difficile), parce que Blanquer nie qu’il y a des contestations alors que tout le monde est majoritairement contre cette réforme. Tout le monde ne se mobilise pas mais majoritairement les collègues sont contre.
Et pourquoi occuper ? Parce que c’est un lieu qui nous appartient. On ne devrait pas avoir à occuper le rectorat. On arrive tout simplement plus à passer les grilles, c’est devenu un endroit hyper protégé de haute surveillance avec caméras, vigiles, des flics, c’est complètement démentiel.
Il n’y a pas de communication aisée et facile avec le rectorat. C’est pour cela que l’on est là. On est non violents mais on a été obligés de passer par dessus les grilles fermées.
Donc là on va tenir une AG parce qu’on a des décisions importantes à prendre par rapport à la suite du mouvement, notamment la rétention des notes par matière qui s’est déjà décidée par les collègues de philo’. On aimerait bien que ça s’étende à l’ensemble des disciplines.
Ben Art’Core / Krasnyi Collective